Pour une thérapie féministe

C'est quoi une thérapie féministe ?

La thérapie féministe ne se contente pas de traiter des problèmes individuels, mais remet en question les structures de pouvoir qui les engendrent
- Judith Jordan

L’objectif premier de la thérapie féministe est sans doute de sortir d’une vision individualisante des violences sociales, en particulier dans le cadre des violences patriarcales, qui peut parfois conduire à une culpabilisation de la personne accompagnée.

Dans l’épisode de mai 2024 de Un podcast à soi, on peut écouter plusieurs femmes témoigner de propos tenus par des psychologues et psychiatres qui ont pu renforcer le sentiment de culpabilité face à des récit de violences conjugales. 

Un exemple de tels propos ? Parler de « relation compliquée et intense » face à des violences psychologiques et de contrôle de la part du conjoint.

Un autre exemple ? Centrer le travail thérapeutique sur les émotions… de la victime.

Ce sont ces biais, qui en plus d’être dangereux sont un non-sens, que l’approche féministe souhaite éviter. 

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Faire lien, faire corps

Juliette Mercier, neuropsychologue et fondatrice du centre de soins engagés Bertha Papennheim, explique que la thérapie féministe fait le lien entre individuel et collectif, et entre le corps et l’esprit.

Se réapproprier son corps, ressentir les émotions pleinement, c’est se permettre de comprendre que les violences systémiques subies au quotidien ont un ancrage réel dans notre vécu.

C’est retrouver son autonomie à partir de l’écoute de ses ressentis et émotions, tous ces signaux qu’on a trop souvent eu le réflexe d’ignorer. Et dans le cas de dissociation traumatique à la suite de ces violences, c’est aussi retrouver les limites corporelles, et toute la puissance que ça implique.

Se situer pour ne pas essentialiser


Sylvie Kaoutar, psychologue et membre de l’Association pour le Soin queer et féministe (ASQF) rappelle la nécessité de se situer en tant que thérapeute et tout ce que cela peut apporter dans le processus thérapeutique. Se situer socialement, c’est savoir où l’on se place dans le champ social en prenant en compte les oppressions systémiques.


Cela permet de comprendre certaines émotions dans le contexte d’oppression vécues au quotidien en dehors d’un prisme individualisant, et de les prendre en compte comme une réaction et non comme un « trait de caractère ».


Se situer en tant que thérapeute permet aussi d’avoir pleinement conscience dans sa pratique de certaines distances sociales en jeu dans la relation, comme celles d’un thérapeute homme face à une victime de violences conjugales, ou une thérapeute blanche face à une victime de racisme. Ces enjeux ne peuvent être correctement pris en compte dans une posture de simple « neutralité bienveillante » souvent inculqués en études de Psychologie classique.

Il y a un soupçon d’un reproche que nous serions dans quelque chose qui favorise une vision victimaire. […] Alors que toute notre approche est basée sur le développement du pouvoir d’agir et que pour développer du pouvoir d’agir, il faut bien nommer là où il n’y en a pas, pour pouvoir trouver les espaces où il y en a, et où la personne elle va pouvoir déployer son pouvoir d’agir et les champs sur lesquels elle va avoir du pouvoir d’agir.
Sylvie Kaoutar, psychologue et membre de l’association pour le Soin queer et féministe
Sources et ressources

Cet article suit principalement la trame de l’épisode : Inventer une thérapie féministe, Un podcast à soi, mai 2024..

Je vous invite donc vivement à l’écouter si cet article vous a intéressé, il est à retrouver juste ici !

Et merci à Aurélie qui m'a conseillé le podcast ! 

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